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la mémoire | article 2

Souvenirs de dégustateur

Troplong Mondot

Maître Assembleur de la Maison Hennessy pendant plus de cinquante ans, Yann Fillioux nous explique pourquoi et comment la mémoire est fondamentale dans la dégustation. Rencontre avec un nez du vin.

Secrets dégustation

Quelles sont selon vous les conditions idéales pour se former à la dégustation professionnelle ?

On ne peut pas avoir de prétention si on ne déguste pas beaucoup et régulièrement. Pendant ma carrière, je dégustais une cinquantaine d’échantillons tous les matins de la semaine à 11h30, entouré du comité de dégustation. Nous étions toujours installés aux mêmes places dans le même bureau.

Il faut en effet avoir une pratique quotidienne et dans un contexte inchangé : même endroit, mêmes personnes, même heure. La dégustation est d’autant plus difficile dans le cas du cognac, car à la différence du vin, le degré d’alcool dilue la perception.

Et surtout, il est primordial que quelqu’un vous guide en permanence.

Secret dégustation

Quel est le rôle de ce guide ?

Il apprend tout d’abord la pratique. C’est une étape très rapide : en quelques mois on sait quelle quantité prendre, à quel moment et comment cracher… Mais c’est surtout une personne qui aide à distinguer ce qui est important, différent, intéressant… C’est cela qui est le plus difficile à apprendre et qui nécessite un maître.

Qu’est-ce qui définit un bon dégustateur ?

On ne peut être un bon dégustateur qu’une fois la mémoire éduquée. C’est un processus long et difficile. Je ne parle que de ce que je connais mais concernant la Maison Hennessy, on considère qu’il faut dix ans pour bâtir une mémoire. Et ceci pour quelqu’un qui a suffisamment de talent !

secrets degustateur

Pourquoi faut-il dix ans ?

C’est le temps minimum pour éduquer sa mémoire.

La mémoire se constitue de deux éléments : la perception et la mémorisation. Peu à peu on crée son référentiel, on organise sa mémoire. Et c’est seulement au bout de dix ans que vous êtes capable de faire référence à la bonne partie de la mémoire que vous cherchez à solliciter. Ce n’est pas propre à la dégustation d’alcool : j’ai eu l’occasion de traiter de ce sujet avec Jean-Paul Guerlain, qui considère également qu’un nez en parfumerie a besoin de dix ans pour bâtir sa mémoire.

Quelle image pourriez-vous donner à votre mémoire ?

C’est comme une bibliothèque dans laquelle on accumule les références. Dégustation après dégustation, vous en comptez des milliers. À force, on peut associer une perception à une référence. Un peu comme si on se disait « je goûte quelque chose que j’ai déjà rencontré, et que j’ai classé étagère 10 meuble 5 ».

Secrets dégustation

Comment utilisez-vous ces références ?

Chez Hennessy, le travail de dégustation ne consiste pas à reconnaître ou étiqueter les odeurs ou les goûts, mais à identifier les meilleures eaux-de-vie. Ce qui compte pour sélectionner des eaux-de-vie, c’est de détecter leur potentiel. Le cognac ne devient pas bon en vieillissant, il doit être bon dès le départ ! À partir de ce pré-requis, il faut savoir comment orienter un lot d’eau-de-vie pour en développer toutes les capacités et savoir quand et comment l’utiliser.

C’est là tout le rôle du dégustateur. Il doit déceler le potentiel d’une eau-de-vie : peut-elle vieillir cinq ans, dix ans, davantage ? Comment va-t-elle exprimer toutes ses qualités ? Quelle est celle qui, au-delà du zéro défaut, a une dimension supérieure qui nous permettra de l’amener au plus loin ?

secrets degustateur

Vous aviez également un rôle d’assembleur

L’assemblage, c’est le but ultime.

Le maître assembleur a la responsabilité de préserver le goût et la qualité de la Maison. À chaque fois que vous buvez un XO Hennessy vous devez retrouver le même goût, quelle que soit l’année lors de laquelle il a été produit. Et cela est vrai pour tous les cognacs de la gamme. À partir des eaux-de-vie en stock, il faut donc savoir utiliser sa mémoire pour créer les bons assemblages. C’est d’ailleurs ce qui m’a rendu le plus fier dans ma carrière, plus encore que d’avoir réalisé des séries limitées exceptionnelles.

Barrique Troplong Mondot

Comment expliquez-vous ce sentiment ?

Ça a été un vrai bonheur pour moi d’avoir réussi à produire, durant tout ce temps, des millions de caisses d’une même qualité (et quelle qualité !)

On ne réalise pas à quel point cela représente une performance de produire de tels volumes année après année, avec un goût constant, sans effet de millésime. Cela démontre la capacité dont je parlais tout à l’heure de discerner le potentiel des eaux-de-vie et de savoir les orienter de la bonne façon au bon moment : quel fût, quel chai, quelle durée… C’est ce qui a rendu mon métier passionnant.

Crédits photo: Alain Benoit, Alfredo Piola, Maison Hennessy.

Article 1 | Construire l'avenir, une mémoire de demain

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Troplong Mondot

Article 3 | La dégustation, une affaire de mémoire

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