La mémoire | article 1

Construire l'avenir, une mémoire de demain

22.0.2021
Regards croisés

Du haut de son promontoire, le vignoble de Troplong Mondot embrasse des contours qui n’ont guère changé depuis sa création en 1700. Assurer la pérennité du domaine, telle a été l’ambition commune des propriétaires successifs. Pour le transmettre, chacun s’est inscrit dans un temps qui le dépasse, véritable philosophie que le groupe SCOR, propriétaire depuis 2017, pratique dans la vision de ses métiers et investissements. Aujourd’hui encore, il est question de se projeter tout en gardant un œil dans le rétroviseur.

À l’heure de l’accélération des changements économiques et sociétaux, il est plus que jamais urgent de se donner du temps pour instaurer des actions dont seules les générations futures verront les accomplissements. C’est dès maintenant que s’écrit le prochain chapitre de la mémoire de Troplong Mondot.

Une propriété viticole ne se construit pas en un jour. C’est dans la continuité qu’elle prend forme. Au gré des acquisitions et des aménagements, un patrimoine naturel et immobilier se constitue pour composer un ensemble cohérent. La notion de relais prend toute sa valeur dans ce contexte. La génération aux commandes dépend de son époque, s’adapte aux aléas économiques, sociaux ou encore climatiques pour assurer la pérennité de ce qu’elle a reçu de ses prédécesseurs. Et se présente comme le dépositaire d’un tout qu’elle devra à son tour transmettre, une fois son empreinte posée : un bâtiment rénové, une parcelle ajoutée, une haie plantée…

Quand on considère les choses selon cette perspective, l’humilité est de rigueur : chacun est un simple rouage d’une mémoire sur plusieurs décennies.

S’INSCRIRE DANS UN TEMPS LONG

Le temps s’étire encore davantage quand il est question de rythme de la nature. Elle fixe son calendrier et impose un temps long. Au renouvellement naturel du vignoble, s’impose la nécessité de l’anticipation : prévoir les cépages qui s’acclimateront le mieux aux changements climatiques, comptabiliser les années de délai qu’il faudra à la vigne pour « s’installer » et donner le meilleur. Et si les vieilles vignes partagent leur patrimoine génétique grâce à la sélection massale, c’est là aussi pour garder en mémoire une forme d’héritage. D’un vigneron à l’autre, se transmettent les gestes, bien sûr, mais aussi et surtout un patrimoine naturel.

À Troplong Mondot, le directeur technique est présent depuis plus de vingt ans et prolonge le travail effectué avant lui pour constituer et entretenir le vignoble. La vigne que nous cultivons aujourd’hui n’est autre que le résultat des préoccupations d’hier. On se saurait être plus avisé qu’en se projetant dans le futur pour nous adapter encore et toujours et construire le vignoble de demain.

Car c’est bien là que se joue notre rôle : dans ce que nous laisserons aux générations futures. Si bon soit-il aujourd’hui, le millésime en cours atteindra son apogée dans plusieurs décennies, dégusté par nos enfants et petits-enfants. Quel vertige ! À nous de savoir évaluer les promesses de chaque lot au moment de l’assemblage. À nous d’estimer l’évolution du vin après plusieurs années de vieillissement. Et au moment de sa dégustation, dans 5, 20, 30 ans… ce sera comme une fenêtre ouverte dans le temps. Un lien entre les générations, un journal des circonstances particulières : l’année d’une naissance, de la canicule, du gel, du nouveau cuvier… Comme une autre forme de mémoire.

ÉCRIRE LE LIEN ENTRE AUJOURD’HUI ET DEMAIN

Figure indissociable de l’histoire de Troplong Mondot, Christine Valette a largement contribué à faire de la propriété ce qu’elle est aujourd’hui. Héritière, elle estimait pourtant ne pas posséder le domaine, affirmant : « Le bureau, la bibliothèque d’Edouard Troplong, je considère que cela ne m’appartient pas, que ça doit rester, même si je dois partir. Comme les vignes, les bois, le parc, les murs… ce sont des choses qui ne nous appartiennent pas. »* En se considérant comme un simple élément d’une chaîne, on en crée la continuité. Et on en assure la longévité.

Pour autant, il ne s’agit pas de se cramponner au passé. C’est en valorisant son héritage qu’on continue de progresser. Tout l’enjeu de la mémoire consiste à comprendre l’histoire pour en tirer le meilleur parti, à savoir remettre en cause les acquis pour s’améliorer et s’adapter à un monde qui change. On pourrait prendre pour preuve le retour au principe de gravité depuis plusieurs années dans les chais bordelais. Méthode traditionnelle abandonnée au profit des pompes, elle est remise en pratique, améliorée d’une plus grande précision des itinéraires techniques et d’une justesse plus fine des gestes. Un exemple parmi d’autres d’une mémoire mise au goût du jour.

Dans ce souci de lier passé, présent et avenir, il est une attitude plus déterminante qu’aucune autre : celle d’une démarche durable. Cela paraît évident pour ce qui est de l’environnement naturel. Troplong Mondot s’est d’ailleurs engagé, depuis plus de vingt ans, dans une viticulture respectueuse de son terroir. Préservation de la biodiversité, valorisation des sols, limitation des intrants, traction animale… sont autant d’indices d’un environnement conçu dans la durée.

Mais la durabilité ne se mesure pas à la seule nature : elle s’applique aux niveaux social et économique. Dans une forme d’humanisme que n’aurait pas reniée Romain de Sèze, Sieur de Mondot et pair de France à l’époque des Lumières, la propriété se conçoit comme un monde regroupant Homme et Nature. Sa vocation est d’assurer la continuité de cet ensemble interdépendant. Cela se concrétise par la démarche de RSE (responsabilité sociétale de l’entreprise) entamée depuis plusieurs années et qui participe des objectifs majeurs de SCOR.