Lookbook | ARTICLE #4

Voir le vin autrement

Suivez le guide, direction Bordeaux ! Petits détails ornementaux et grands monuments, ruelles pavées et jardins, à Bordeaux le vin se voit et raconte une histoire. Pour le plaisir des yeux nous vous suggérons un périple pour repérer les signes de l'activité viticole et de négoce qui traversent la ville et les siècles.

Bas-reliefs sur les façades, mascarons au-dessus des portes et fenêtres, fontaines : les ornements architecturaux qui émaillent la ville sont autant de clins d'œil au vin et à la prospérité du négoce bordelais. Les décors de grappes et de pampres se mêlent aux figures réelles ou mythologiques qui ont fait la gloire de Bordeaux. Ainsi, les bienfaiteurs de la viticulture rencontrent Bacchus, dieu du vin mais aussi Mercure et Neptune, divinités du commerce et de la navigation.

Septembre 2022

A pied, à vélo ou bien en tramway, levez les yeux et suivez notre parcours sur les signes du vin dans les rues du Port de la Lune.

Rendez-vous rue Bourbon, où sur la façade préservée d’une ancienne bâtisse, on devine qu’elle était celle d’une maison de négoce grâce aux ceps de vigne et à la barrique sculptés dans la pierre. Tout le quartier des Chartrons était organisé par et pour le commerce, avec de belles façades ornées cachant d’immenses bâtiments en enfilade destinés au stockage. Leurs larges portes permettaient le passage des barriques qui étaient roulées jusqu’au bord du fleuve.

2. En continuant le long des Quais vers le centre, on remarque de nombreuses façades ornées de décors montrant l’activité de commerce de vins liée au port. Les cours Xavier Arnozan et du Médoc, adresses mythiques de ce qu’on a appelé « l’aristocratie du bouchon », montrent également de belles ferronneries et bas-reliefs dans un style classique. Mais attardons-nous dans les ruelles : rue Raze par exemple, une porte en bois attire l’attention. Particulièrement remarquable avec son décor de grappes, elle montre que les décors n’étaient pas réservés aux bâtiments majestueux des quais et grandes avenues.

3. Détour par le Jardin Public, où ce sont des savants qui trônent le long des allées à côté du muséum. Le buste d’Ulysse Gayon rend hommage au « fondateur de l’œnologie bordelaise et organisateur de la lutte contre le mildiou », comme l’indique le socle gravé. Quant à Alexis Millardet, il est représenté avec une allégorie de la vigne qui symbolise « la viticulture reconnaissante » envers ce botaniste qui a permis de créer des plants résistant au phylloxéra et mis au point la bouillie bordelaise, fongicide permettant de traiter le vignoble.

4. Sur la Place des Quinconces tout proche, la fontaine du monument aux Girondins domine la perspective. On y voit un Bacchus rieur sculpté dans la pierre. De l’autre côté de l’ensemble, un immense bronze représente une femme tenant une grappe et trois enfants sous traits d’angelots dont l’un est assis sur une barrique. Ils sont symboles de prospérité et de continuité entre les générations.

5. La balade se poursuit vers les allées de Tourny, la place de la Comédie puis la place de la Bourse. Sur de nombreux édifices du XVIII^e siècle qui ont donné à Bordeaux son identité, figures de Bacchus et grappes de raisins embellissent les fenêtres. La ville compterait plus de 3000 de ces mascarons, dont la fantaisie anime la rigueur des façades.

6. Plus loin, sur le quai de Paludate, le Château Descas construit à la fin du XIX^esiècle affiche fièrement l’activité florissante de son fondateur, dans un style néobaroque. La splendeur de la façade était une véritable vitrine pour cet ensemble architectural dédié au négoce de vrac qui n’occupait pas moins de 10 000 m². Moins prestigieuse que celle de ses voisins du quai des Chartrons consacrée aux grands crus, cette activité commerciale se devait d’en mettre plein la vue ! Ainsi, au-dessus de la porte d’entrée monumentale, deux statues représentent la viticulture et Mercure, alors que les pampres et les grappes se multiplient sur l’ensemble du bâtiment, accompagnant les mascarons sous les traits de Bacchus et Neptune.

7. Place de la Victoire, les deux tortues de bronze portant une grappe sont un clin d’œil beaucoup plus récent puisqu’elles ont été commandées par la Ville de Bordeaux en 2005 à l’artiste tchèque Ivan Theimer. Leur carapace porte le nom des différentes appellations bordelaises. Elles se trouvent au pied d’une colonne hélicoïdale symbolisant la vigne qui s’élève comme une liane et décorée de motifs rappelant l’histoire du vin et des vignobles. Elles côtoient un cep probablement planté à l’époque de la Révolution et soigneusement conservé depuis plus de 200 ans. Plus ancienne vigne située intra-muros, elle produit quelques bouteilles chaque année.

8. Dans le même quartier, la Bourse du Travail bâtie en 1936 était le siège des syndicats. Elle évoque sur sa façade les activités qui ont fait la richesse de Bordeaux. L’immense bas-relief signé par Alfred Sanniot, un des plus grands sculpteurs d’architecture de l’entre-deux-guerres, fait la part belle au travail de la vigne et à l’expédition du vin.

9. A quelques pas de là, la fontaine « Burdigala », le nom latin de Bordeaux, surgit comme un éblouissement sur la place Amédée Larrieu. Chef d’œuvre du sculpteur Raoul Verlet daté de 1901, cet ensemble méconnu regorge de détails. Le sujet principal est une nymphe, allégorie de la ville, entourée d’un chérubin portant une hotte de vendangeur. De l’autre côté, on retrouve un bateau et des éléments de vigne qui font référence à la vocation commerciale et maritime de Bordeaux.

10. Fin de la balade à proximité de la basilique Saint-Seurin qui fut construite sur une nécropole antique située sur un vignoble. Place de Martyrs de la Résistance, l’entrepreneur Henry Frugès a fait construire un hôtel particulier par l’architecte Pierre Ferret. Ces deux grandes figures bordelaises du début du XX^e siècle, attachés aux thèmes naturalistes, ont mis le vignoble à l’honneur sur la façade de ce joyau imaginé par son propriétaire comme un « petit musée des arts et techniques du début du siècle ». En levant les yeux sur cet immeuble Art déco, on peut admirer des balcons et une superbe rotonde sculptés, dévoilant une nouvelle interprétation des signes du vin dans la ville.

Bordeaux cache bien d’autres traces du vin dans son architecture ou ses décors, patrimoine d’une ville qui doit sa renommée au vignoble qui l’entoure. Levez les yeux lors de vos promenades, pour voir comment Burdigala rend hommage à Bacchus.

Pour aller plus loin, nous vous conseillons la visite « Balade sur les traces du vin dans la ville » disponible à l’Office de Tourisme.